Avec tout le respect du aux bonnes intentions dont les auteurs de ces projets ont ete sans doute animus, qu'il nous soit permis de formuler quelques braves observations qui se presentent prima facie aux jugements les plus objectifs meme de ceux qui sont fermement convaincus de la necessite de creer sans retard un organisme international puissant capable de garantir la paix. 1) La question de la votation semble la plus preoccupante. Si les textes qui ont ete communiques au public par la presse, sont fideles et complets; s'il n'existe aucune clause de sauvegarde, prevue par quelque accord bi ou plurilateral secret, on ne peut passe faire de grandes illusions sur l'avenir du plan en question. Le droit d'une des cinq Grandes Puissances, membre permanente du Conseil, d'opposer son veto et par la de paralyser toute action coercitive contre l'agresseur ~ventuel, entache toute le systeme d'un grave vice initial. . 2) Si le triomphe des principes demoeratiques sur le plan interne des Etats est, nous dit-on, le but principal de guerre pour lequel combattent les Nations Unies, les textes adoptes a DumBarton Oaks semblent reveler sur le plan international des tendances toutes autres que demoeratiques. Sur les trois organismes du systeme, equivalant aux trois pouvoirs, l'executif, le 1egislatif et le judiciaire --, c'est l'executif qui l'emporte de beaucoup sur les deux autres qui, comme dans les regimes totalitaires, ne sont investies que d'attributions de second plan, controlees, -- meme celles-ci , par le pouvoir executif. L'Assemblee surtout, n'a que des attributions d'ordre general; tout droit de prendre, elle, quelque initiative pour garantir la paix ou pour sanetionner l'agresseur lui a ete soigneusement denie. C'est la, je me permets respectueusement mais fermement d'affirmer, une autre erreur psychologique et politique grave qui menace de ruiner tout le systeme. 3x L'une des causes de la mort de la S.d.N. a ete le manque de rapidite dans les decisions, les longueurs procedurales interminables. Il suffit d'evoquer a cet egard le souvenir decevant des Commissions qui nommaient des sous-commissions, quidesignaient des rapporteurs et qui finissaient par ....enterrer les questions les plus graves, les plus dangeureuses, pour la grande desolation de tous ceux qui avaient foi dans le principe de la securite collective. Or, le projet laisse entrevoir les memes lacunes, generatrices des memes deceptions. 4) Rien n'a ete envisage concernant la creation d'une loi commune internationale. Or, comment peut-on parler d'une justice internationale tant qu'il n'y a point de loi internationale? Car, qu'est-il, en somme, le droit commun international si non un amas parlois, confus et souvent contradictoire d'opinions d'auteurs et de vagues coutumes...? 5) Rien n'a ete precise concernant la Cour de justice et surtout rien concernant son obligativite et le droit de prononcer des astreintes et des mesures conservatoires, comme en droit prive, qui pourraient se reveler d'une utilite irrcalculable pour eviter les conflits. Voila une premiere serie de considerations, que j'appellerais prdjudicielles, qui se presentent l'esprit de tous ceux qui, sine ira et studio, suivent de pros l'evolution des idees et des discussions sur l'echiquier international. Mais il y a encore d'autres aspects d'opportunite pratique qu'il convient d'examiner. Selon l'opinion de maints publicistes, l'organisation de la paix semble devoir comprendre l'univers tout entier. A Dumbarton Oaks cette idee a ete favorablement accueillie. -4- |