La tendance est noble et nons ne saurions assez y applaudir. Elle semble pourtam soulever de telles difficultes, qu'en supposant qu'on y arrive, la mise en oeuvre et l'application pratique d'un plan tellement gigantesque, exigeront du temps, beaucoup de temps. Or, le monde a besoin d'un certain nombre de realisations hic et nunc, surtout dans certaines regions nevralgiques. Tout en poussant de l'avant, par consequent, l'organisation universelle, on devrait proceler sans autre a la creation d'un certain nombre de federations regionales. Si l'organisation mondiale se realisait, ces federations y parteciperaient en cette qualite, ce qui augmenterait singulierement le poids de leur parole et faciliterait enormement la creation et la mise en mouvement de la machine universelie, par definition plus lente et plus complexe. Si au contraire, cette immense organisation n'aboutissait pas, ou bien si elle n'etait mise sur pieds, dans une premiere etape, que d'une maniere imparfaite, les groupements regionaux pourraient completer, eux, ces lacunes, la ou le manque d'organisation se serait fait le plus sentir, en attendant l'amendement de l'organisme universel. C'est cette hypothese probablement qu'ont eu en vue les auteurs de l'avant-projet > de Dumbarton Oacks qui, dans son Paragraphe VIII Section C., parle precisement d'accords regionaux. Mais ces >, a notre avis ne devraient pas se borner a etre de simples alliances defensives, selon les anciennes methodes qui se sont revelees malheureusement, plus d'une lois, inoperantes. Seul le lien federatif qui reunit un groupe assez important de Puissances, pourrait se verifier efficace. Ce n'est qu'en creant une vie collective permanente, et en mettant en commun toutes les resources de ces pays, tons leurs moyens de defense, qu'on realisera, en cas de danger, cette promptitude dans la decision, cette unite de volonte et de commandement offrant des chances de succes. L'exemple de la Petite Entente et de l'Entente Balkanique est encore present a nos esprits. Il est vrai que ces alliances n'avaient que des objets limites: l'hypothese d'une anaque hongroise pour la premiere, d'une attaque bulgare pour la seconde. Depourvues cependant de liens organiques suffisants, meme lorsque l'hypothese d'une attaque hongroise se dessina contre la Tchecoslovaquie en 1938, ou quand la menace bulgare se produisit contre la Roumanie en 1940, les antres associes formulerent des exceptions, opposerent des objections, que les deux agresseurs avaient justement escomptes d'avance et qui ne se seraient pas produits si les dits groupements avaient ete lies non pas par de simples traites d'alliance, mais bien par des liens federatifs, qui auraient cree pendant les longues annees d'etroite vie commune un etat d'ame ainsi qu'une communaute d'interests et une organisation, rendant toute defection inconcevable. Voit-on, par exemple, Geneve, le Valais ou Berne se detacher de Bale ou de Zurich dans l'hypothese d'une attaque allemande contre ces deux Cantons? Voit-on les Etats Occidentaux de l'U.S.A. abandonner ceux de la cote du Pacifique au cas d'une attaque japonaise? La necessite, l'urgence meme, de la creation de ces federations regionales nons apparait comme ,une premiere etape dictee par la prudence -- fille de la douloureuse experience de notre Continent -- dans la longue et difiicile voie de l'organisation de la paix. Pour y arriver, un certain mombre de conditions prealables doivent cependant etre reunies. -5- |